Mise au point

anti intervention syrie

La Syrie, la Syrie, la Syrie… Tout l’échiquier politique ne nous parle plus que de ça. Alors, parlons en.

Les va-t’en-guerre déjà, humanistes épris de justice qui nous refont le coup de l’intervention amicale ou néoconservateurs voulant exporter la démocratie parlementaire. C’est vrai que ça a tellement bien marché en Afghanistan, en Irak ou au Mali, pour ne citer que les derniers exemples! Honte à ces gens qui justifient les massacres et les pillages de demain au prétexte d’un devoir supposé d’ingérence, d’une fonction de « gendarmes du monde » qu’on conteste à l’impérialisme US pour tenter de la récupérer. Honte à ces pays qui ont armé des dictatures compradores, qui ont fabriqué, vendu et utilisé plus d’armes chimiques que n’importe quelle autre nation au monde, dévastant le Moyen Orient et l’Asie du Sud-Est. Les centaines de milliers de morts au Vietnam, au Laos, en Palestine et ailleurs ne sont ni oubliés, ni pardonnés.

Honte aussi aux nationalistes qui se découvrent à bon compte une sensibilité anti-impérialiste! Mention spéciale aux néofascistes italiens de Casapound, qui oublient un peu vite les massacres en Éthiopie, les guerres et les crimes du régime de Mussolini. Dans les années 60 et 40, ces sous-merdes ont activement collaboré avec les réseaux terroristes stay-behind de l’OTAN  pour réprimer les mouvements populaires. Et les voilà revenir en défenseurs de la paix dans le monde face au « Grand Satan USA-Israël ». Gageons que si des troupes sont envoyées sur place, ils changeront encore de discours et soutiendrons « leurs » soldats! Mais n’oublions pas que nous avons les mêmes en France, toujours prêts à demander plus d’armes et plus de crédits pour les armées, comme le Front National. Leur projet impérialiste agressif est le même que celui du « système » qu’ils prétendent combattre, leur souverainisme affiché n’est rien d’autres qu’une restructuration de la domination néocoloniale. Ces ennemis de classe font le jeu des marchands de canon, Dassault et consorts en tête.

Honte enfin à tous ces « progressistes » qui se jettent dans les bras de Bachar el-Assad sans retenue, qui se cherchent constamment un modèle à l’étranger, ne voyant pas la complexité des rapports de force. Ces enfants de la période Brejnev ne voient qu’un impérialisme, et c’est l’OTAN; ils sont prêts à oublier les centaines de milliers de révolutionnaires assassiné(e)s par les baasistes syriens et les mollahs iraniens, tant qu’ils peuvent agiter un anti-impérialisme à sens unique. Ils légitiment ainsi la répression de nos camarades en nous expliquant gentiment « qu’il y a des priorités » et « qu’il faut être uni ». Non, tout ce qui bouge n’est pas rouge, et nous n’avons pas à fermer les yeux sur les crimes d’un régime sous prétexte qu’il est attaqué.

Quant à nous, notre position est claire: nous sommes totalement opposés à l’intervention impérialiste en Syrie, et ce, pour tous les pays. Que ce soit l’OTAN avec les USA et la France, ou bien la Russie, la Chine et l’Iran, qui sont déjà bien implantés dans la région. Nous soutenons les forces progressistes et anti-impérialistes dans ces différents pays, notamment les organisations kurdes contre les salafistes. Néanmoins, puisque nous sommes dans l’État français, notre internationalisme nous pousse à combattre en priorité notre propre impérialisme. Pas de compromis avec la barbarie.

Feu de Prairie

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8 commentaires pour Mise au point

  1. Razi Golan dit :

    Il y a intervention et intervention… celle-ci, je le crois vraiment, est différente des autres : il ne s’agit pas d’imposer un changement de régime, de s’installer là-bas ni même d’envoyer des troupes, il s’agit (juste) de dire qu’on ne peut pas rester indifférent face à un meurtre de masse effroyable contre son propre peuple, dans la ville-même où le dictateur a son palais. Les armes chimiques doivent disparaître de la surface de la planète. La « communauté internationale » ne peut pas laisser passer ce genre de crime sans réagir. On se demande encore pourquoi il n’était pas possible de bombarder les chemins de fer qui menaient à Auschwitz, pourquoi on a laissé la République espagnole à son sort et on refuserait de réagir à un tel crime ! Il ne s’agit pas d’impérialisme ici mais de réagir au nom de l’humanité tout entière à un crime contre l’humanité. Ce sont les Etats-Unis et la France qui le font. Malgré le passé impérialiste de ces pays je fais plus confiance à leurs dirigeants actuels qu’à ceux de la Russie et de la Chine. Je mets en lien l’interview de Rony Brauman à RFI : c’est quelqu’un qui a dénoncé toutes les autres ingérences impérialistes récentes, mais qui fait la différence avec ce qui s’est passé ces-jours-ci en Syrie. http://www.rfi.fr/moyen-orient/20130830-rony-brauman
    On a raison de se révolter contre la barbarie !

    • La question de la comparaison revient en effet souvent; il est pourtant clair qu’il faut s’opposer à toute intervention et ce pour plusieurs raisons.
      -Déjà d’un point de vue purement militaire et cynique, des frappes au missile ne règleraient rien, elles vaudraient une avancée en profondeur des troupes de la FSLA qui ne sont pas des anges. Ça ne ferait qu’ajouter quelques centaines de morts à une guerre qui en a déjà trop fait. L’organisation de l’armée du régime survivrait très probablement à ces frappes et la guerre s’enliserait.
      -Politiquement, c’est une carte blanche donnée à la rébellion dont les franges les plus réacs sont en progression (front Al Nosra et autres groupes responsables d’atrocités). Les progressistes se font liquider.
      -De plus au niveau géopolitique, l’axe Téhéran/Moscou/Pékin (c’est une simplification abusive, on est d’accord que les choses sont plus compliquées) n’est surement pas plus dangereux en Syrie que le bloc OTAN, car il est moins stable; historiquement il n’a pas participé à beaucoup de conflits de façon groupée, au contraire, et ses armées sont encore en retard sur celles de l’OTAN (pour quelques petites années, et sur le plan des opex principalement). Les interventions se limitent donc à un soutien industriel et financier que les occidentaux seraient bien hypocrites de dénoncer…
      -Moralement, intervention venant de pays qui se sont fait connaitre par des bains de sang ne sera jamais vue comme un arbitrage objectif, qu’on se le dise. Au contraire, elle peut avoir l’effet inattendu (et qu’on ne jugera pas) de pousser une majorité de la population syrienne à soutenir le régime face au « grand satan » US/Israël. De la mission Voulet-Chanoine au massacre du PKI, de la ligue Bodo au phosphore blanc à Gaza, les pays impliqués ont laissé faire tant d’atrocités que leur capital sympathie est épuisé…
      Bref, qu’on tourne le problème dans un sens ou dans l’autre, on en arrive aux mêmes conclusions. Des pays ayant commis de nombreux crimes se lancent dans une aventure militaire sans le soutien de leurs populations (limite évidente de la démocratie parlementaire représentative), avec des résultats espérés négligeables voire contre-productifs même en supposant qu’ils aient raison sur le fond. Or pour nous, peut importe qu’il soit intéressés ou humanitaire, l’impérialisme a toujours vocation à défendre une « position stratégique » internationale justifiant les interventions futures, un « prestige » face aux autres nations finalement inférieures; bref il amène systématiquement à la guerre, à la domination, et est toujours à combattre. Pour résumer, il n’y a pas de « bonne » intervention, et quand on parle de libération avec des missiles, ça sent toujours mauvais. 😉

      D. pour FdP

      • Razi Golan dit :

        Je comprends votre position, je soutiens votre lutte contre l’impérialisme et suis bien d’accord que quelques missiles ne serviront pas à grand chose mais :
        – on ne peut pas dire que la guerre s’enliserait en cas de raid occidental ! cela fera bientôt 3 ans que le peuple syrien vit un martyre après s’être dressé en masse, sans armes, pour protester contre les tortures infligées à des gamins qui avaient écrit des graffitis anti Assad (http://edition.cnn.com/2012/03/01/world/meast/syria-crisis-beginnings). Si ce n’était pas alors une révolution populaire contre une dictature et un régime de terreur, comment doit-on le qualifier ? Que ce mouvement révolutionnaire se soit vu confisquer (sauf au Kurdistan comme vous l’avez montré) sa lutte, c’est malheureusement sûr, mais l’attitude qui consiste à regarder de haut ces différentes factions me fait penser à celle qui prévalait pendant la guerre d’Espagne : à quoi bon s’engager pour la République puisqu’il y a parmi les républicains des staliniens, des anarchistes, des trotskistes qui en plus se tirent dessus.
        – Les soutiens à Assad au niveau international sont de deux types : la Chine et surtout la Russie (ou plutôt Poutine, car ce n’est pas le peuple russe qui est impliqué mais son dictateur) bloquent toute action de la communauté internationale via les Nations Unies ; La république islamique d’Iran, en revanche, est massivement impliquée dans ce conflit : elle en a défini la ligne au début de l’insurrection populaire (ne rien lacher face aux émeutiers comme ils l’ont fait lors de l' »élection »/coup d’ Etat d’Ahmadinejad). Le régime iranien joue sa survie à long terme et ne peut pas se permettre de perdre sa « 32ème province » (ou 33ème, après le Liban)… C’est aussi un aspect de la guerre la plus active sur notre planète actuellement : la lutte chiites/sunnites qui ensanglante quotidiennement le monde sans que celui-ci ne réagisse, puisque cela ne rentre pas dans ses cadres de pensée universalistes (entre l’Iraq, le Pakistan et maintenant de nouveau le Liban, les attentats et massacres sont incessants). L’implication iranienne directe et via le Hezbollah avait été cachée dans un premier temps et est ouvertement revendiquée maintenant que les combattants envoyés en Syrie commencent à revenir chez eux les pieds devant : http://www.45enord.ca/2013/06/syrie-cest-lescalade-liran-enverrait-4-000-soldats-delite/ (il y avait aussi un bon article du Monde de septembre 2012, mais il est en version abonnés)
        – D’un point de vue moral : vous faites bien de rappeler les épisodes du passé qu’il faut absolument ramener dans notre mémoire collective, mais bon sang ON NE PEUT PAS laisser des crimes contre l’humanité se dérouler devant nos yeux sans réagir !! que ce ne soit pas avec de nouvelles bombes, soit, mais quand le peuple syrien s’est levé pour demander justice pour ses enfants torturés, le monde doit se lever avec lui pour demander justice pour ses enfants syriens gazés devant nos yeux !!! On ne peut pas être universaliste et ne pas voir que ces enfants sont nos enfants ! Feu de prairie doit crier aussi cette indignation-là !

      • feudeprairie dit :

        Le problème reste le même: qui soutenir, et qui combattre.
        En Syrie la situation a largement évolué depuis le début du soulèvement populaire (légitime), et le conflit s’est internationalisé. A l’investissement des organisations shiites que tu notes, il faut rajouter celle des pétromonarchies du golfe (elles mêmes en concurrence entre elles), et des occidentaux (USA/Israël notamment) via la Jordanie, avec la formation de troupes d’élite parmi les composantes « laïques » de l’ASL. Ces pays poussent leurs pions sur place et ont tous intérêt à ce que la guerre prenne un tour décisif. Mais ce serait une victoire pour quoi? Si c’est pour voir le front al-Nosra au pouvoir dont les exactions sont déjà connues, alors même que ces djihadistes disaient vouloir eux aussi utiliser des armes chimiques, ce n’est pas la peine. Pour faire un parallèle avec la guerre d’Espagne, cela déboucherait sur des années de répression et de massacres, bref une victoire de la réaction sur toute la ligne. Nous n’avons pas plus d’espoirs concernant el-Assad. Rappelons qu’avant les interventions d’Afghanistan et d’Irak, il y a eu aussi une « préparation psychologique » des opinions publiques avec force documentaires sur la charia ou les prisons de Saddam. On voit ce que la guerre a amené, la paix ne vient jamais par les bombes… Ce qui est abject, ce n’est pas la mise en avant des crimes de guerre du régime (que nous dénonçons et contre lesquels il faut lutter), mais leur récupération pour la propagande interventionniste américaine et française. De plus ces états violent leur propre légitimité à l’ONU ou dans leurs parlements, prouvant que dès que leurs intérêts sont en jeu, le droit disparait. C’est plutôt inquiétant: quelle « démocratie » prétendent ils exporter, et quelle est leur légitimité?
        Comme tu le fais remarquer, c’est aussi un conflit confessionnel, et prendre le parti des shiites ou des sunnites aurait des conséquences dramatiques. Les chrétiens, alaouites et autres communautés syriennes paient déjà le prix fort.
        Alors, qu’en est il du soulèvement populaire originel? Pour ce qu’il en reste, ce sont les forces que nous jugeons les plus légitimes en Syrie, et celles que nous appuyons, ainsi que les Kurdes. Voilà le genre de texte que la gauche de ce courant produit. Nous soutenons cette ligne par solidarité: http://communismeouvrier.wordpress.com/2013/08/24/syrie-lextermination-du-peuple-revolte-les-armes-chimiques-du-regime/#more-31439 « Ni Washington, ni Moscou, Ni Riyadh, ni Téhéran ».
        Si aujourd’hui ce sont les factions les plus réacs anti-Assad qui appellent à une intervention, et pas les héritiers du soulèvement populaire du début, ce n’est pas pour rien… La seule voie pour que ces forces progressistes se développent et gagnent du soutien, c’est de suivre leur ligne et de combattre l’intervention des occidentaux. Sinon, ce sera la fuite en avant, et là il y aura non seulement des bombardements d’ampleur, mais en plus le régime pourrait gazer de nouveau…

        PS: un camarade fait remarquer à l’instant l’usage récemment documenté de phosphore blanc à fallujah en 2005 par l’armée US, la vente d’armes chimiques à l’Irak de Saddam, et en novembre dernier l’utilisation du même type d’armes contre les guérillas du MKP dans l’est de la Turquie. Pays membre de l’OTAN…

  2. Ekintza dit :

    « à quoi bon s’engager pour la République puisqu’il y a parmi les républicains des staliniens, des anarchistes, des trotskistes qui en plus se tirent dessus. »

    C’est justement parce que c’étaient des « stals », des anars, des révolutionnaires, des progressistes, qu’on soutenait les républicains. L’inverse de la Syrie.

    « D’un point de vue moral : vous faites bien de rappeler les épisodes du passé qu’il faut absolument ramener dans notre mémoire collective, mais bon sang ON NE PEUT PAS laisser des crimes contre l’humanité se dérouler devant nos yeux sans réagir !! que ce ne soit pas avec de nouvelles bombes, soit, mais quand le peuple syrien s’est levé pour demander justice pour ses enfants torturés, le monde doit se lever avec lui pour demander justice pour ses enfants syriens gazés devant nos yeux !!! On ne peut pas être universaliste et ne pas voir que ces enfants sont nos enfants ! »

    Tout le problème est que comme dit FdP ces crimes existent des deux côtés.

    Sur l’utilisation d’armes chimiques contre le MKP :
    http://odiodeclase.blogspot.fr/2012/11/turquia-uso-de-armas-quimicas-contra-la.html

  3. Ekintza dit :

    Une question… C’est fréquent que ce torche cul de « Réseau Voltaire » publie du Le Pen ?
    http://www.voltairenet.org/article180037.html

    • Ekintza dit :

      Le grand « anti-impérialiste » US et UK Meyssan approuve pourtant les bombardements de Dresde et de Tokyo (Hiroshima et Nagasaki aussi ?) :
      http://www.voltairenet.org/article179903.html

    • feudeprairie dit :

      Il semblerait, ils avaient défendu Troisième Voie après le meurtre de Clément… Ces gens là ont choisi leur camp, tout comme Riposte Laïque. Ça donne envie de hurler aux libéraux « on vous avait prévenu » mais bon il y a des moments où on aurait préféré se tromper. Il suffit de relire les analyses antifascistes d’il y a 3-4 ans pour constater leur pertinence.

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